L’une des annonces les plus importantes, lors des réunions de la COP26 à Glasgow en novembre, a été le lancement du Conseil des normes extracomptables internationales (ISSB), une émanation des International Financial Reporting Standards (IFRS). Compte tenu de son soutien de la profession comptable, l’ISSB est susceptible de devenir la référence en matière de rapports sur la durabilité et d’être adoptée comme base des rapports obligatoires dans de nombreuses juridictions. Cependant, ce mouvement de standardisation ne fait pas l’unanimité. Pourquoi ?
Une évaluation de matérialité détermine simplement quels points de données doivent être inclus dans le rapport durable d’une entreprise. Contrairement à la matérialité simple, la matérialité double pousse le concept plus loin et appelle les entreprises à rendre compte également de leur impact sur le monde au sens large, comme le climat, la biodiversité ou l’écosystème. Le mot « double » fait référence au fait que les entreprises qui rendent compte de la durabilité doivent considérer la pertinence d’une question de durabilité sous deux angles : la matérialité de l’impact et la matérialité financière.
La matérialité financière aborde les questions liées à la durabilité qui créent des risques ou des opportunités susceptibles d’affecter la performance financière d’une entreprise. Des exemples de ce point de vue sont le risque de réputation dû à des incidents de corruption, l’introduction de mécanismes de tarification du carbone ou les risques liés au développement de nouvelles énergies renouvelables. La matérialité financière est une approche incluse dans les cadres de divulgation tels que SASB et TCFD, et promue par la SEC aux Etats-Unis.
La matérialité de l’impact, d’autre part, mesure également l’effet négatif ou positif que l’entreprise pourrait avoir sur son environnement, qui à son tour peut indiquer sa contribution au développement durable. La taxonomie de l’Union Européen confirme que la double matérialité est la base de la divulgation d’informations non financières (source FISMA). Aux côtés de l’Européen Financial Reporting Advisory Group (EFRAG), qui, à travers la directive européenne sur les rapports de développement durable des entreprises (CSRD), vise à mettre en œuvre une approche de double matérialité.
Ainsi, en résumé, la matérialité double consiste à prendre en compte non seulement l’impact des facteurs environnementaux et sociaux sur les bénéfices financiers de l’entreprise (matérialité financière), mais également l’impact de l’entreprise elle-même sur son environnement et la société. Et bien que la matérialité double fasse partie intégrante des normes de l’UE, il est clair que l’ISSB n’a pas l’intention d’inclure la matérialité de l’impact dans ses normes de durabilité. Mis à part les considérations politiques entre les régulateurs européen et américain, les critiques affirment que la matérialité double peut entraîner une surcharge d’informations, une mauvaise prise de décision et une augmentation des coûts d’information.
Alors que l’ISSB continue de gagner du terrain, une question devra trouver une réponse : les rapports sur la durabilité devraient-ils devenir uniquement un outil permettant aux investisseurs de minimiser les risques financiers ? Ou devraient-ils également servir d’indicateur de la responsabilité des entreprises, garantissant que les entreprises agissent dans l’intérêt plus large et à long terme de la société ?
De même que la sensibilité en termes de durabilité est propre à chacun, le niveau de matérialité à prendre en compte devrait dépendre également de cette sensibilité, selon nous. Si vous vous souciez de l’impact de votre portefeuille sur l’environnement et la société, le concept de la matérialité simple est clairement trop simpliste. L’essentiel est que vos valeurs se reflètent le plus sereinement possible dans la composition de votre portefeuille.
Quoi qu’il en soit, ces nouvelles propositions de reporting représentent une opportunité d’harmonisation des normes extra-financières à l’échelle internationale, promettent d’uniformiser le langage utilisé par les entreprises dans la communication des informations extra-financières envers leurs parties prenantes. Une tendance qui ne peut être que bénéfique pour éviter les confusions et le risque d’écoblanchiment pour les investisseurs.
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