Point sur les marchés - 14 septembre 2020
-
Daniel Varela Chief Investment Officer
L'essentiel
Les deux semaines consécutives de baisse sur le S&P 500 (et le Nasdaq) ont passablement normalisé les indicateurs de sentiment des investisseurs. Ceux-ci sont en effet revenus en zone neutre. Néanmoins, cette consolidation n’est pas suffisante et un retour sur les actions américaines, toujours richement valorisées, nous semble prématuré.
La croissance des exportations chinoises s’est accélérée en août. Malgré une hausse supérieure aux attentes de 9,5% sur un an, un tassement à terme de ces exportations est néanmoins toujours attendu. L’épidémie de COVID-19 devrait en effet commencer à peser dans les mois à venir et ceci malgré le rebond espéré de l’activité mondiale.
Alors que les négociations entre le Royaume-Uni et l’UE restent difficiles, Boris Johnson a exprimé sa volonté de revenir en partie sur l’accord du Brexit, notamment sur les sujets concernant le commerce avec l’Irlande du Nord. La livre a décroché à la suite de ces rebondissements, reflétant l’augmentation des probabilités d’un Brexit dur.
La BCE ne réagit pas à la force de l’euro
La semaine dernière, la Banque Centrale Européenne (BCE) tenait sa réunion de politique monétaire. Celle-ci intervenait quelques jours après le changement stratégique annoncé par la Réserve fédérale américaine. Pour rappel, la Fed s’est démarquée de la philosophie suivie par la majorité des grandes banques centrales durant les quarante dernières années en annonçant privilégier désormais la croissance économique face à l’objectif de stabilité des prix. Et d’annoncer dans la foulée être prête à tolérer un niveau d’inflation supérieur à 2% à l’avenir. En conséquence, les investisseurs doivent s’attendre à un maintien plus longtemps que prévu du contexte actuel de politique monétaire ultra-accommodante aux Etats-Unis. Alors que la BCE est elle-même au milieu d’une revue stratégique, une prise en compte de ce changement de cap majeur outre-Atlantique était attendu. Ce d’autant que les derniers chiffres d’inflation s’inscrivent très en-dessous de son objectif, avec un recul des prix en août de -0.2% sur un an dans l’Union européenne.
Malheureusement, la BCE a quelque peu douché les espoirs des investisseurs. Elle considère cette inflation négative comme très temporaire. Pourtant, les pressions désinflationnistes se sont renforcées dernièrement en Europe. L’appréciation de près de 10% de l’euro face au dollar s’accompagne en effet d’une baisse très nette des prix importés sur une part importante de biens et matériaux rentrant dans la zone euro. Certes, Mme Lagarde la présidente de la BCE annonce maintenir son programme de relance et sa politique monétaire très accommodante. Mais un geste supplémentaire pourrait s’avérer nécessaire pour freiner une hausse de la monnaie unique qui menace par ailleurs la reprise économique européenne au moment où la situation sanitaire se détériore sur le Vieux-continent.
La prochaine réunion de l’institution européenne est agendée pour fin octobre. Dans l’intervalle, les négociations houleuses sur le Brexit pourraient peser momentanément sur l’euro et offrir un peu de répit à la BCE. Mais en cas d’appréciation supplémentaire de la monnaie unique face au dollar, Madame Lagarde se devra de réagir. La posture très dogmatique de la BCE a souvent pénalisé l’économie européenne par le passé. On se souvient notamment d’une hausse malheureuse des taux durant l’été 2008, quelques semaines avant une des pires crises financières de l’histoire. Pour l’instant, Mme Lagarde a plutôt bien réussi la gestion d’une crise intervenue très tôt dans son mandat. Mais une rechute économique consécutive à un euro trop fort risquerait d’entacher sa crédibilité.
Etats-Unis : changement prochain à la Maison Blanche ?
A peine un mois et demi nous séparent des prochaines élections américaines et les sondages semblent tous refléter une large victoire du candidat démocrate Joe Biden. Une gestion chaotique de la crise sanitaire et les agitations liées aux violences policières dans le pays ont terni la popularité du président sortant, jusque dans les rangs républicains. Pourtant, alors qu’un changement de présidence se précise, a fortiori un basculement démocrate, la sous-performance des actions qui a historiquement accompagné un tel scénario n’a pas eu lieu. Certes, les bourses étaient plus volatiles ces dernières semaines, mais les investisseurs sont plus préoccupés par les valorisations excessives des valeurs technologiques que par l’élection à venir.
Tout d’abord, parce que Joe Biden est l’un des candidats démocrates les plus « modérés ». Il y a fort à parier que l’éventualité d’une victoire d’un candidat comme Bernie Sanders aurait créé un séisme boursier tout autre. De plus, les thèmes chers aux démocrates et négatifs pour les bourses n’ont pas été mis en avant durant cette campagne présidentielle atypique. Crise économique et sanitaire oblige, pas question de mentionner une hausse de la fiscalité des entreprises ou une pression quelconque sur le secteur de la santé.
Enfin, même s’il a été globalement plébiscité par les marchés financiers, Donald Trump a mis à rude épreuve les nerfs des investisseurs, qui pourraient privilégier une présidence plus traditionnelle. Sauf si, une fois encore, Donald Trump défie les sondages qui le donnent perdant.
Auteur
-
Diplômé de l'Université de Genève en Gestion d'entreprises, option Finance, Daniel Varela a débuté sa carrière en 1989 en tant que gérant obligataire. Il rejoint la Banque Piguet & Cie en 1999 en tant que Responsable de la gestion institutionnelle également en charge de l'analyse et de la gestion obligataire de la Banque. En 2011, il est devenu Responsable de la stratégie d'investissement et du département des investissements de Piguet Galland. Il a rejoint le Comité de Direction de Piguet Galland en janvier 2012 en tant que Chief Investment Officer.