L’essentiel
Après la Banque Centrale Européenne, ce fut au tour de la Banque d’Angleterre de relever son taux directeur de 25pb à 4.25% pour faire face à des pressions inflationnistes persistantes. Comme l’activité économique résiste mieux que prévu et qu’une récession semble pouvoir être évitée, le resserrement des taux n’est sans doute pas terminé, ce qui devrait être un soutien pour la livre.
En Europe, la saison des résultats s’avère excellente et témoigne d’une bonne capacité de fixation des prix par les sociétés. A ce jour 60% des sociétés ont battu les attentes du consensus au niveau des bénéfices, alors que 20% ont déçu, ce qui est quasiment un niveau record. Compte tenu de la bonne performance boursière depuis le début de l’année, les marchés sanctionnent durement les sociétés dont les résultats déçoivent.
Le cuivre est à la peine cette semaine et atteint de nouveaux points bas sur l’année, confirmant les statistiques décevantes sur l’activité manufacturière. A plus long terme, l’image est très différente avec une forte demande liée à la transition énergé-tique et peu de nouvelle production.
Les investisseurs se satisfont des faibles rendements sur le franc
Thomas Jordan n’a pas chômé ces derniers temps. Le président de la Banque Nationale Suisse (BNS) a en effet été fortement impliqué dans le sauvetage de la deuxième plus grande banque helvétique. A ce stade, ses inquiétudes ont sans doute laissé place à un sentiment de soulagement. Une crise bancaire majeure a en effet été évitée et on note des signes d’apaisement sur le marché interbancaire en franc suisse.
Les primes d’assurance sur le risque bancaire (contrats de « credit default swap » ou CDS) sont en effet en net reflux sur les banques du pays ces dernières semaines. En matière de politique monétaire, la sérénité règne. Certes la BNS n’en a pas terminé avec son resserrement monétaire. Une hausse de 0.25% est quasiment acquise lors de sa prochaine réunion prévue à fin juin. Ce pourrait être la dernière hausse pour ce cycle, déjà. Car la situation de notre institut d’émission semble très enviable par rapport à celle de nombreux banquiers centraux.
Alors que la conjoncture freine un peu partout dans le monde, certains grands argentiers seront contraints de refermer encore le robinet du crédit en raison d’une inflation toujours trop élevée notamment en zone euro et au Royaume-Uni. En Suisse, le ralentissement des prix est notable. L’inflation au détail a freiné plus fortement que prévu en avril. En glissement annuel, le renchérissement n’atteint plus que 2.6% contre 3.5% à son sommet de l’été dernier.
Si l’inflation helvétique n’a pas monté autant qu’ailleurs et qu’elle ralentit plus vite actuellement, cela doit beaucoup à la force du franc suisse qui limite l’inflation importée. Car, en amont de la chaîne de transmission des prix, la décélération est sensible avec une inflation à la production et à l’importation qui n’est plus que de 1% contre près de 7% il y a un an. Et la résilience du franc suisse continue de surprendre.
Pourtant, depuis le début de l’année 2022, le supplément de taux offert par la Banque centrale européenne sur l’euro face au franc a augmenté de 1%, tandis que l’excédent de rendement offert par la Réserve fédérale américaine sur le dollar a grimpé de près de 3% face au taux de la BNS.
Pour l’instant, visiblement, les investisseurs n’en ont cure et préfèrent encore la sécurité du franc suisse, quitte à l’acheter proche de ses sommets historiques. Et le marché obligataire suisse profite également de ces flux comme en atteste le recul des rendements à 10 ans sous la barre des 1%.
Etats-Unis : la Fed en mode « pause »… et ensuite ?
Depuis de nombreux mois, les économistes ont tenté de prédire le moment ou la Réserve Fédérale (Fed) stopperait le resserrement de sa politique monétaire. L’évolution de l’inflation américaine a été la principale jauge scrutée par Jerome Powell pour déterminer si la hausse des taux directeurs avait été suffisante. C’est finalement après une hausse cumulée de 500 points de base que la Fed s’est décidée à adoucir sa rhétorique.
Dans le même temps, l’inflation est passé de plus de 9% à un peu moins de 5% en avril 2023. Cette période de répit est saluée par les investisseurs qui espèrent à nouveau que l’économie américaine échappera à une récession. Ces espoirs sont exacerbés par des publications de résultats réjouissantes de la part des sociétés du S&P 500 ainsi que par la stabilisation – à des niveaux certes faibles – des indicateurs d’activité économique.
Ces mois de « pause » dans la politique monétaire de la Fed représentent une période propice pour les indices boursiers et serviront notamment à évaluer à quel point la conjoncture peut encore ralentir, alors que les effets des hausses de taux agissent avec retard. Déjà, les conjectures portent sur le timing d’un éventuel assouplissement de la politique monétaire, dans le cas d’une détérioration majeure de l’économie.
Le marché table sur une première baisse des taux en novembre. D’ici là, l’évolution de l’inflation, du marché de l’emploi et des indicateurs d’activité seront les principaux points d’intérêt des investisseurs. Sans oublier l’épée de Damoclès que représente la négociation autour du relèvement du plafond de la dette aux Etats-Unis, principal souci de ce début d’été
Auteur
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Diplômé de l'Université de Genève en Gestion d'entreprises, option Finance, Daniel Varela a débuté sa carrière en 1989 en tant que gérant obligataire. Il rejoint la Banque Piguet & Cie en 1999 en tant que Responsable de la gestion institutionnelle également en charge de l'analyse et de la gestion obligataire de la Banque. En 2011, il est devenu Responsable de la stratégie d'investissement et du département des investissements de Piguet Galland. Il a rejoint le Comité de Direction de Piguet Galland en janvier 2012 en tant que Chief Investment Officer.