Point sur les marchés - 24 avril 2023
-
Daniel Varela Chief Investment Officer
Les craintes de crise financière reculant, l’or a connu des prises de profits et traite à nouveau sous 2’000$/once. La consolidation en cours permettra de réduire l’optimisme élevé dont il a fait l’objet avant de potentiellement établir de nouveaux sommets historiques.
Les chiffres économiques chinois publiés la semaine dernière confirment les récentes données à haute fréquence. Si la reprise est tirée par le secteur des services, comme en témoigne la croissance des ventes au détail de 10,6 % en glissement annuel en mars, la croissance du secteur manufacturier a ralenti sans grande surprise au premier trimestre, en raison d’une demande plus faible dans les économies développées.
Dans la zone euro les indices des directeurs d’achats ont une fois de plus surpris par leur vigueur, avec des services qui compensent largement la faiblesse du secteur manufacturier. Cette divergence montre qu’il existe encore une demande refoulée postpandémie pour certains pans du secteur des services tels que les voyages. Ce tableau positif va donner des arguments à la BCE pour poursuivre son cycle de resserrement monétaire.
Etats-Unis : la confiance des investisseurs à nouveau mise à mal
Alors que l’année 2023 avait débuté sur une note optimiste aux Etats-Unis, la crise de confiance qui s’est manifestée à l’égard de quelques banques régionales est venue saper le moral encore fragile des investisseurs. Résultat, le S&P 500 était quasiment de retour à la case départ à la fin du mois de mars, alors qu’il affichait une progression de près de 10% début février.
En l’occurrence, il s’agit non pas d’un problème généralisé de solvabilité des banques du pays, mais bien d’une perte de confiance à l’égard de certains établissements bancaires de taille réduite qui ont souffert de déficiences réglementaires et du resserrement abrupt de la politique monétaire opéré par la Réserve fédérale américaine.
Si ces événements ont peu de risque de déboucher sur une crise financière similaire à celle de 2008, ils contribueront vraisemblablement un peu plus au ralentissement économique en cours aux Etats-Unis. Rappelons d’ailleurs que c’est ce ralentissement qui permet aujourd’hui une normalisation de l’inflation, tendance appelée à s’intensifier au deuxième trimestre.
La croissance du PIB américain devrait donc rester anémique cette année, mais néanmoins positive. Et si les bénéfices des entreprises vont certainement marquer le pas, voire accuser un léger recul durant plusieurs trimestres consécutifs, le bout du tunnel semble relativement proche.
Dans la seconde moitié de l’année déjà, on pourrait assister à un rebond de l’activité, avec à la clé des publications de résultats dépassant à nouveau les attentes du consensus qui, bien qu’encore un peu trop élevées, tendent à se normaliser. En outre, le cycle de resserrement monétaire touche à sa fin, et le marché attend de Jerome Powell qu’il marque une pause durable dans le relèvement des taux directeurs.
Les éléments nécessaires à un rebond boursier se mettent doucement en place et les investisseurs se sont montrés plus optimistes depuis le début du mois d’avril. En outre, la saison de résultats qui a débuté aux Etats-Unis semble bien se passer et indique que les attentes des analystes ont sans doute atteint un point bas, plus réaliste au vu du niveau des indicateurs d’activité économique.
Nous conservons notre vision constructive à l’égard de l’économie américaine ainsi que notre positionnement neutre sur les actifs risqués de cette région. Nous augmenterons bien évidemment l’allocation si notre scénario se vérifie au cours du deuxième trimestre.
Le sommet sur les taux a été dépassé
Les banques centrales pourront difficilement prendre le risque de durcir encore fortement leurs politiques monétaires. Les tensions observées au sein du système bancaire mondial, qui ont fait plusieurs victimes des deux côtés de l’Atlantique, suggèrent en effet qu’il est désormais temps pour les grands argentiers des pays développés de faire une pause dans leur lutte contre l’inflation et de se préoccuper de la santé du système financier.
Certes, après de très nombreuses années de stabilité des prix, des producteurs, des intermédiaires ou certains distributeurs continuent de chercher à profiter de l’aubaine offerte par le contexte actuel pour pousser leurs prix et leurs marges à la hausse, malgré la rechute récente des cours des denrées de base. On le constate en particulier sur les produits alimentaires.
Mais la désinflation paraît globalement bien engagée et elle ne pourra que se renforcer sous l’effet du resserrement du crédit qui découlera des fragilités du secteur bancaire nouvellement apparues. Les rendements des emprunts d’Etat à long terme devraient commencer à anticiper le changement de cap des taux directeurs et s’inscrire en baisse dès ce printemps.
Les taux gouvernementaux avec des échéances à un ou deux ans, qui montrent habituellement une plus grande sensibilité face à l’évolution du contexte économique et financier, ont d’ailleurs déjà commencé à se détendre après avoir atteint des sommets pluriannuels au début du mois de mars.
Et malgré les incertitudes récentes, les obligations d’entreprises ne devraient pas trop marquer le pas face aux titres de meilleure qualité. Les débiteurs privés affichent en effet un endettement moyen raisonnable en comparaison historique, et ils ont généralement profité de la période de taux bas pour se refinancer à très long terme aux Etats-Unis comme en Europe.
Auteur
-
Diplômé de l'Université de Genève en Gestion d'entreprises, option Finance, Daniel Varela a débuté sa carrière en 1989 en tant que gérant obligataire. Il rejoint la Banque Piguet & Cie en 1999 en tant que Responsable de la gestion institutionnelle également en charge de l'analyse et de la gestion obligataire de la Banque. En 2011, il est devenu Responsable de la stratégie d'investissement et du département des investissements de Piguet Galland. Il a rejoint le Comité de Direction de Piguet Galland en janvier 2012 en tant que Chief Investment Officer.