Point sur les marchés - 27 juillet 2020
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Daniel Varela Chief Investment Officer
Les indices des directeurs d’achat de la zone euro ont rebondi fortement en juillet pour le troisième mois consécutif dépassant largement les attentes du consensus. La reprise se fait sur un large front : tant le secteur manufacturier que les services passent en territoire d’expansion et viennent ainsi confirmer la reprise des indicateurs d’activité à haute fréquence.
Les tensions géopolitiques entre les États-Unis et la Chine continuent de s’intensifier et de s’étendre avec les fermetures respectives des consulats de Houston et Chengdu. Ce conflit devrait sans doute se prolonger jusqu’à l’élection présidentielle américaine de novembre.
Le leader mondial des puces Intel accuse un retard dans la production de sa technologie de 7 nanomètres, initialement prévue pour fin 2021, et l’oblige à se tourner pour la fabrication d’une partie de ses futurs processeurs vers les fonderies de TSMC (Taiwan) et Samsung (Corée). Cela devrait compliquer davantage la tendance à la relocalisation dans le secteur de la technologie.
L’or au firmament
En ce début de semaine, le cours du métal jaune a atteint un record historique et s’approche de la barre symbolique de 2’000 dollars l’once (environ 31 grammes). Sa progression atteint près de 7% sur une semaine et 30% depuis le début de l’année. De telles hausses sont rares en dehors de périodes de crise financière. Sa dernière grande phase de hausse s’était d’ailleurs produite au moment de la crise des subprimes de 2008 et de la crise des dettes gouvernementales européennes au début des années 2010 alors que les craintes à l’égard du système financier étaient à leur paroxysme. Mais depuis, les risques systémiques ont fortement reculé et n’expliquent pas l’envolée récente du métal jaune. Les inquiétudes entourant l’évolution de la pandémie de Covid-19 ont certainement soutenu la demande de la part d’investisseurs particulier et institutionnels. Néanmoins, c’est du côté des banques centrales qu’on doit se tourner pour trouver la principale raison de cette hausse. Car les grands argentiers de ce monde ont brisé les digues dogmatiques qui régissaient les politiques monétaires depuis la deuxième guerre mondiale. L’histoire économique regorge d’exemples de monnaies qui dévaluent fortement à la suite d’un recours abusif à la planche à billets. Actuellement, toutes les grandes banques centrales appliquent des méthodes non-conventionnelles qui ont pour but d’accroître leur bilan et d’inonder leur système bancaire de liquidités. Dans ce contexte, on doit s’attendre à ce que toutes les devises à des degrés divers tendent à se déprécier face à des actifs réels dont font partie les métaux précieux en général et l’or en particulier. C’est une des raisons qui nous incite à maintenir une part d’or importante dans les portefeuilles, bien que celui-ci apparaisse un peu suracheté à court terme et pourrait faire l’objet de quelques prises de bénéfices. Le dollar fait partie des monnaies les plus pénalisées par l’action des banques centrales. La Réserve fédérale américaine a réagi rapidement et agressivement face à la crise sanitaire et la récession. Le billet vert était depuis longtemps pénalisé par une situation de double déficit des Etats-Unis (commercial et budgétaire), mais il profitait d’un différentiel de rendement attractif. Des taux américains désormais au plancher ont fini par dissuader les investisseurs. La glissade observée depuis quelques semaines semble destinée à se prolonger et nous conforte dans notre décision prise à la fin du mois de juin de réduire le billet vert dans les portefeuilles.
L’heure de l’Europe est-elle enfin arrivée?
Ce ne fut pas sans peine. Toutefois le résultat est là : les 27 membres de l’Union européenne ont convenu d’un accord sur un plan de relance économique basé pour la première fois sur une dette commune. Sans grande surprise, quelques compromis ont été effectués comme par exemple le montant des subventions distribuées, qui sera réduit par rapport au montant initial, mais les éléments essentiels de la Commission sont restés inchangés. Ce plan est historique. D’une part il vient soutenir l’économie dans la sortie d’une crise sans précédent, notamment au travers de la transition énergétique tout en ciblant les pays de la périphérie qui ont été les plus touchés par la pandémie. D’autre part, il constitue sans doute une première étape vers une plus grande intégration fiscale. Ce sont des signaux forts, qui viennent réduire les risques d’un éclatement de la zone euro, qui a été une des plus grosses craintes de ces dernières années. Du reste, depuis l’annonce de la proposition du plan franco-allemand initial, les bourses de la zone euro affichent la meilleure performance reflétant une nette amélioration de la perception vis-à-vis de la région. Nous pensons que cette tendance peut se poursuivre, car après de longues années de sous-performance, les actions de la zone euro restent sous-détenues dans les portefeuilles des investisseurs dans le monde. De plus, la bonne gestion de la pandémie, le fort rebond des indicateurs économiques et la stimulation inédite de la Banque Centrale Européenne et des Etats nous amènent à penser que la zone euro pourrait même sortir plus rapidement et plus durablement de cette crise que d’autres régions.
Auteur
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Diplômé de l'Université de Genève en Gestion d'entreprises, option Finance, Daniel Varela a débuté sa carrière en 1989 en tant que gérant obligataire. Il rejoint la Banque Piguet & Cie en 1999 en tant que Responsable de la gestion institutionnelle également en charge de l'analyse et de la gestion obligataire de la Banque. En 2011, il est devenu Responsable de la stratégie d'investissement et du département des investissements de Piguet Galland. Il a rejoint le Comité de Direction de Piguet Galland en janvier 2012 en tant que Chief Investment Officer.