
Les investisseurs reprennent confiance
L’évolution des marchés financiers sur la semaine écoulée traduit un retour de l’appétit pour le risque de la part des investisseurs. Le comportement des bourses mondiales en est le parfait exemple avec une hausse généralisée de l’ensemble des places financières dans le sillage de New York qui progresse de plus de 4 %. Les titres de croissance, en particulier le secteur de la technologie, et ceux liés à la consommation discrétionnaire progressent le plus, alors que les titres les plus défensifs marquent le pas. Cela prouve que les craintes d’une récession continuent de reculer depuis la volteface de Donald Trump sur les droits de douane réciproques.
Le retour de l’appétence au risque est également observé sur le marché obligataire. Sur la semaine, on observe ainsi une surperformance des obligations à haut rendement américaines face aux emprunts gouvernementaux. De manière générale, les actifs dits risqués ont récupéré une bonne partie de la forte baisse mesurée durant la première quinzaine du mois d’avril. Seul le dollar américain fait exception.
Le billet vert reste en effet proche de ses points bas récents, notamment contre l’euro, les investisseurs craignant que l’administration américaine ne favorise une dépréciation de sa monnaie pour contribuer à la réindustrialisation du pays.
Tarifs extrêmes : vers une désescalade inévitable ?
Après un début d’année prometteur, l’annonce des nouveaux tarifs douaniers lors du "Jour de libération" le 2 avril a érodé une bonne partie des gains accumulés par les marchés asiatiques. L’impact de ces mesures tarifaires instaurées par l’administration Trump varie selon le degré d’ouverture économique des pays concernés. Les économies fortement tournées vers l’exportation — telles que le Vietnam, la Malaisie ou Taïwan — apparaissent plus vulnérables que les marchés davantage orientés vers la demande domestique, à l’image de l’Inde. Cette dernière a d’ailleurs démontré une résilience notable en cette période de volatilité, se redressant après une phase de correction survenue à la fin de l’année dernière.
Bien que la plupart des pays asiatiques bénéficient d’un sursis temporaire en matière de droits de douane jusqu’au début du mois de juillet, le bras de fer engagé entre Washington et Pékin s’intensifie, avec des taux de droits de douane annoncés respectivement à 145 % pour les États-Unis et 125 % pour la Chine. Ces niveaux représentent une tout autre échelle par rapport aux tarifs imposés lors des tensions commerciales de 2018.
Dans ce contexte, bien que l’incertitude persiste, la probabilité d’une désescalade tarifaire semble croître du jour en jour. Un environnement de tarifs aussi prohibitifs est en effet difficilement soutenable pour les chaînes de valeur globales. La nécessité d’une résolution rapide s’impose afin d’éviter des répercussions économiques sévères pour les deux premières puissances économiques mondiales. La véritable interrogation porte désormais sur la capacité respective de chaque partie à supporter les coûts induits pour leurs économies, leurs marchés financiers et leurs consommateurs.
Dans les prochaines semaines, l'épuisement des stocks existants devrait conduire à un ajustement des prix et/ou une compression des marges bénéficiaires des entreprises, exposant ainsi pleinement l’impact économique de la crise commerciale. Le risque de voir les consommateurs confrontés à des étagères vides représente une menace politique pour l’administration Trump. Déjà, la chute significative observée dans le volume de conteneurs transportés constitue un signal avant-coureur inquiétant des défis à venir dans le commerce international.
Toutefois, un élément positif émerge : le président Trump semble faire preuve d’un comportement plus mesuré et flexible qu’anticipé, comme en témoigne son revirement sur les tarifs réciproques et ses déclarations plus modérées envers le président de la Réserve fédérale.
Dans l’intervalle, alors que les investisseurs attendent de voir qui fléchira le premier, le sentiment de marché à l’égard de l’Asie — et de la Chine en particulier — demeure relativement déprimé. Cette aversion au risque pourrait limiter le potentiel de baisse et offrir une source de diversification attrayante pour les portefeuilles, surtout dans un contexte de dépréciation graduelle du dollar américain.
Chiffre de la semaine : +0.5 %
Après une chute brutale début avril, l'indice américain des valeurs technologiques a connu un rebond tout aussi spectaculaire, effaçant l'intégralité de ses pertes. En effet, malgré d'importantes ventes, il affiche désormais une performance positive (+0.5%) sur avril. Depuis le début de l'année, le recul n'est plus que de 10 %.
Auteur
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Ed Yau est un spécialiste des marchés asiatiques avec 20 ans d’expérience en gestion de portefeuilles d’actions. Auparavant, il a travaillé comme responsable de la recherche dans plusieurs Hedge Funds en Suisse et à Singapour. Ingénieur HES de formation, il est également titulaire d’une licence de l’Université de Genève et d’un MBA de l’Université de Chicago. Il rejoint la Banque en 2018 et devient membre du comité d’investissement, en charge de la gestion de plusieurs fonds actions et certificats thématiques, ainsi que de la mise en place d’investissements ESG.